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la r22
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À la censure qui revient en force en troquant sa vieille peau contre celle de la liberté, s’est ajouté une autre forme de neutralisation des sujets, leur surexposition à outrance. Il suffit de refuser de s’éteindre à petit feu pour se voir attribuer le potentiel d’une matière hautement inflammable, saturer l’espace médiatique et être poussé à se débattre contre une incinération immédiate. Les réseaux sociaux enflamment les passions qui s’orientent aux grè du vent. La presse dominante et les institutions du libéralisme tardif en font des bons combustibles. Les forêts brûlent, les voitures, les corps et l’impatience brûlent. Les cols blancs en font un bon combustible. C’est l’urgence nous dit-on et il faudrait être fou pour penser qu’il n’y a pas le feu au lac.
Mais dans l’esthétique du brasier, depuis laquelle laquelle T.J Demos nous invite à penser, un bout de l’alarme incendie s’est endormie au fond de la classe pendant que l’autre a complètement déraillé. Les écrans ont, quant à eux, retrouvé leurs usages initiaux et servent de nouveaux à protéger de l’ardeur du foyer. Quelles histoires mobiliser pour frayer des mondes vivables dans ce contexte ? Peut-être pas des histoires inédites — du jamais vu! — mais des histoires qui se souviennent, des histoires qui crépitent.
C’est donc en se laissant guider par les signaux de fumées que l’on se tourne de nouveau vers le média AOC qui, après la publication du texte Le grand Paris par Epic Games de Mélanie Yvon et Elitza Gueorguieva dans le cadre d’une résidence avec la R22, nous invite dans le «dreaming» (on trouvera un récit de la notion de dreaming dans l’enregistrement disponible plus bas avec Elizabeth Povinelli et Olivier Marboeuf) de Notre Dame avec Sylvain Piron. À lire ici.
Entre ces deux publications, les auteurs se sont retrouvés autour de la première émission de la R22, à la lisière d’un bois de banlieue et d’une cité HLM que le Grand Paris convoite. Pour savoir ce qu’il s’y trame et d’où vient cette histoire, l’émission est disponible juste ici :
(liaison:PLATEAU DU TOUT-MONDE N°1 : TOUT AUTOUR DE ROMAINVILLE)
De Romainville au Bush australien
On emmenait Kieran à l'école (l'enfant dans le film), qui ne veut pas toujours y aller, et on attrapait sur le chemin d'autres personnes. À ce moment là on s'est retrouvé devant un feu déclenché par les extractions et exploitations industrielles. C'était très impressionant, massif. Kieran a insisté : «— Le feu, le feu ! — Oui, c'est un putain de gros feu, on peut pas le traverser — Non…! Le film !»
De Romainville au Bush australien, nous nous somme arrêter aux Lilas pour écouter Elizabeth Povinelli nous raconter le chemin parcouru depuis sa dernière venue au 15 rue Chassagnolle, l’année dernière, et échagner autour du dernier film du collectif Karrabing.
Les Sirènes ou Aiden au pays des Merveilles est une puissante intervention dans les débats contemporains à propos du futur-présent du changement climatique, du capitalisme extractif, de la toxicité industrielle pensés depuis le point de vue des mondes indigènes.
Avant de pouvoir se délecter des riches conversations du séminaire organisée par Aline Caillet et Marco Renzo Dell’Omodarme autour de son travail, nous vous proposons de nous replonger dans la spirale de cette rencontre.
(liaison: Elizabeth Povinelli, autour du film «Mermaids»)
Et de faire un détour par le printemps dernier avec sa première venue.
(liaison: Autour du Karrabing film collective)
De Saint-denis…
Saint-Denis maintenant, la basilique n’envie rien à notre dame, Synesthesie ¬ Mmaintenant prépare son antenne tandis qu’à quelques pas, le Pavillon s'apprête à inaugurer le revue Kafar édité par Nadir Khanfour et Mawena Yehouessi. Nous sommes à l’étage, où «il fait plus chaud qu’ailleurs», où on partage la banquette avec des revenants, d'où l’on écoutera ce qu’il peut se dire à partir du noir, comme un contrepoint à l’actualité spatiale, sur terre, comme un contrepoint et un héritage des luttes de l'antiracisme politique. On ne sait pas encore s’il y aura une antenne sur la R22 mais on peut déjà vous partager l’intervention que Nadia Yala Kisukidi avait donné lors du séminaire Black Lens organisé par Khiasma l’année dernière. Vous pourrez retrouver une autre version de ce texte et d’autres alternatives à l'injonction du brasier contemporain en commandant votre numéro à l’adresse : revue.kafar [at] gmail [dot] com
(liaison:L'hospitalité raciale)
Et en écho, dans le même séminaire, Nadir Khanfour avait déjà commencer à voiler quelques gestes aux prémices de cette revue. On l’écoute ici.
(liaison:Voilage des corps)
…aux Lilas
Pour suivre ces perspectives, on pourrait aussi se souvenir d’un feu de joie qui a éclairé 2005, qui couvait sous la cendre avant cette année là et qui continuera de le faire autant de fois que nécessaire. On ne pourra pas vous éviter un coup de chaud ou des brûlures d'estomac mais on pourra se rencontrer. Le prochain rendez-vous auquel participera la R22 se donc autour d’un barbecue, dans la rue ou dans la cours d’Un lieu pour respirer et du Star Hôtel, avec les sourires ou la perplexité de quelques voisins et voisines, de quelques curieux et curieuses. On y parlera de ce que ça peut vouloir dire de faire un lieu dans l’intensité du présent, avec des vies qui ne sont pas ignifugées et des histoires inflammables.