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la r22
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Cette semaine on sort le nez de notre histoire pour réveiller une archive du futur, inouïe, avec Elena Sorokina, Natasa Petresin Bachelez, Kristina Solomoukha et Paolo Codeluppi. Nous vous donnons rendez-vous ce jeudi 18 juin, de 11h00 à 13h00, en direct sur la r22 ou au seuil de la rue D'orchampt pour continuer nos dérives avec ce qui pousse dans cette nouvelle séquence de luttes pour respirer. Celle-ci prendra la forme d'une discussion avec Paolo Codeluppi, Elisabeth Lebovici, Olivier Marboeuf, Yala Nadia Kisukidi, Natasa Petresin Bachelez, Kristina Solomoukha, Elena Sorokina, Emilie Villez.
Notre espace social a muté. Là où hier encore l’accès et la circulation étaient assurés, aujourd'hui le sol est devenu instable. Les distances établies entre nous et les réalités se sont évaporées du jour au lendemain, se sont pétrifiées ou prolifèrent en se multipliant à l'image du virus.
Réveillées dans un lit d'une rivière en crue, il nous faut désormais composer avec ces conditions inédites. « On considère habituellement que l’espace est porteur des organisations, que les tracés de représentations spatiales sont stables et signifiants puisqu’ils décrivent un état représentatif du système productif ». Eh bien, notre espace devenant deltaïque s’est mis à générer des organisations changeantes constamment ajustées à ses caractéristiques mouvantes…
Ces changements ont frappé de plein fouet des artistes, modifié le fonctionnement de structures, des évènements culturels et il est difficile pour le moment d’y voir clair. Afin d‘appréhender cette territorialité nouvelle, nous avons besoin de reconstituer un espace de pensées, un relais d’antennes.
Pour faire un état des lieux Kristina Solomoukha et Paolo Codeluppi aux cotées de Elena Sorokina et Natasa Petresin Bachelez ont imaginé un débat, une table ronde transmise en direct sur les ondes de R22 Tout-Monde. Le débat abordera des questions de l'hyper-sanitarisation et l’hyper-disciplinarisation des publics des évènements artistiques, des mesures qui sont en train de se mettre en place actuellement. La pandémie a modifié les modalités de rassemblement des corps dans l’espace public d’une manière radicale, comment cela affecte-t-il l’organisation et la réception des expositions ? Seront questionnés les fonctionnements de mécanismes disciplinaires existants et l’invention de nouveaux dispositifs qui surviennent au moment même où les mobilisations contre les violences policières et en soutien du mouvement Black Lives Matter s’intensifient de manière intersectionnelle et spectaculaire en France et dans le monde.
Une des notions qui permet à repenser et à construire des formes nouvelles de relations vis-à-vis des publics dans la sphère artistique est la notion du « care ». Elle renvoie à l’attention qu’on peut porter à l’autrui, à la sollicitude et au soin mutuel. Aujourd’hui cette notion est de plus en plus liée au changement social. Selon Angela Davis « notre compréhension de la radicalité a changé au fil du temps. Le soin… est fondamental pour les mouvements sociaux. Par exemple, les peuples autochtones et leurs alliés ont réarticulé leurs positions en tant que protecteurs plutôt que manifestants, soulignant l'importance de prise de soin de la terre et d'être ses bons intendants. »
Organisé en collaboration avec Kristina Solomoukha et Paolo Codeluppi suite à leurs projets « Objets magiques », ce débat est le deuxième volet de l’« Initiative for Practices and Visions of Radical Care ». Initié lors du confinement par Natasa Petresin-Bachelez et Elena Sorokina, l’« Initiative » propose des façons transformées de travailler et de comprendre la notion de care. Théorisé comme un tissu conjonctif affectif entre un moi intérieur et un monde extérieur — un sentiment avec, plutôt qu'un sentiment pour les autres — le travail de soin offre « un poids viscéral, matériel et émotionnel aux actes de présentation, qui couvrent une large gamme de localités : nous-mêmes, les communautés et les mondes sociaux. La réciprocité et l'attention aux dynamiques inéquitables qui caractérisent notre paysage social actuel représentent le type de soins qui peuvent radicalement refaire des mondes qui dépassent ceux offerts par l'État néolibéral ou post-néolibéral, qui s'est révélé inadéquat dans sa dispensation des soins. »
Le débat se déroulera au 1, rue d’Orchampt dans le 18ème, sur le trottoir, devant le lieu d’exposition « Objets magiques ». Confinée quelques jours avant l’ouverture, l’exposition a dû trouver des nouvelles façons d’exister et d’accueillir le public. Les formes d’accueil étaient élaborées en dialoguant avec l’ensemble des artistes de l’exposition.
Rédigé par Elena Sorokina, Natasa Petresin Bachelez, Kristina Solomoukha et Paolo Codeluppi en juin 2020.